Just passing by - Joseph

Cet endroit était une cage. Une cage immense qui maintenait Clarke loin des siens. Depuis hier, la jeune femme essayait de repérer les différents endroits à l'aide de la carte donnée par Dante Wallace. Il l'avait reçue dans son bureau après qu'elle lui fut ramenée par le sergent Remington. Elle s'était échappée de sa cellule de quarantaine et s'était promenée, poignet ouvert, dans les couloirs jusqu'à l'entrée du grand hall dans lequel elle se trouvait présentement. Les habitants en train de dîner avaient assisté à ce triste spectacle, c'est pourquoi il avait été impératif que Clarke soit emmenée loin du grand hall le plus vite possible. Un jour après, Clarke était toujours aussi perdue. Ici, elle et les siens avaient des lits, de la nourriture, des douches, un paradis pour les délinquants qui avaient vécu les pires malheurs depuis leur arrivée sur Terre. Pourtant, Clarke ne parvenait pas à faire confiance en quiconque ici. Ce peuple lui semblait étrange, bien trop confiant, et l'endroit bien trop confiné. Elle voulait partir, mais elle avait l'impression que les montagnards n'étaient pas prêts à la laisser partir.

Elle allait quand même essayer. Elle trouverait un moyen. Pour l'instant, elle se promenait simplement, annotant les lieux sur la carte pour pouvoir se repérer plus facilement. Elle essayait de rester discrète. Elle ne connaissait pas encore assez bien ce peuple pour prévoir leur réaction quand ils la découvriraient en train de fouiner. Elle n'avait pas non plus envie de le découvrir.
Elle cocha le numéro d'une salle sur le plan pour se souvenir qu'elle était déjà passée par là. Elle continua son chemin jusqu'à parvenir à un petit escalier. Elle regarda autour d'elle et s'y assit pour cocher toutes les salles du coin et les mémoriser rapidement. Il lui faudrait essayer de voir ce qu'elles contenaient pour espérer trouver une sortie ou un moyen de sortie. Mais en attendant, elle allait devoir partir, car un homme venait de débarquer dans le couloir. Et tout comme elle l'avait remarqué, lui aussi l'avait vue. Trop tard.

Encore un garde. Du moins, il en avait la tenue et la carrurre. Clarke ne semblait tomber que sur eux. La veille, elle avait rencontré le Sergent Remington qui l'avait amenée au bureau du président de ce lieu, Dante Wallace. Cela n'avait pas suffi à convaincre Clarke que les montagnards étaient de bon coeur et qu'ils ne voulaient que le bien des gens du ciel. Ils les avaient kidnappés, après tout, et Clarke n'avait pas eu l'autorisation de sortie qu'elle avait demandé. Cela ne faisait que gonfler le doute qu'elle avait sur ce nouveau peuple. Plus elle restait ici, plus elle se disait qu'il aurait peut-être été mieux pour elle de rester avec les natifs. Ces barbares l'auraient peut-être tuée, elle et les autres prisonniers délinquants, ou alors - Clarke se torturait à l'imaginer - la cheffe native n'aurait pas réussi à l'abattre. Elle l'aurait écoutée, elles auraient négocié. Quand elle l'eut rencontrée dans la forêt, en tant que femme et non en tant que cheffe, elle n'avait pu se résoudre à lui donner une place importante au sein de son peuple. La cheffe des natifs avait été Anya, et seulement Anya, non cette fille des bois dont le nom lui était encore inconnu.

Ici, elle avait très vite rencontré le chef qui avait discuté, poliment, gentiment avec elle. Mais elle n'avait pas l'impression d'avoir été réellement écoutée. Peut-être ce nouveau venu avait-il un point de vue sur la question. Serait-il dangereux de demander ? Que risquait-elle de plus ? Elle était déjà enfermée. Personne ne voulait la laisser sortir. Elle jaugea le nouveau venu. Même sans signe, elle aurait pu dire qu'il était dans l'armée. Il avait l'allure, le comportement. Il était même peut-être déjà sorti. Et s'il avait été de ceux qui les avait ramenés ici ?
- Je préférerais être seule dehors, je ne suis pas vraiment fan des murs froids, répondit-elle sèchement. Elle se dit qu'il était sûrement préférable d'apaiser son ton. Se mettre le premier venu à dos n'était pas une bonne idée pour obtenir un soutien, ou même des réponses sur ce lieu étrange. Elle replia sa feuille et se leva, n'appréciant pas le fait d'être assise face à un inconnu imprévisible debout à quelques pas.
- Les miens sont dehors et je ne peux pas les aider, je suis inquiète, expliqua-t-elle calmement, espérant obtenir un minimum de compassion. Ces montagnards ne pouvaient être sans coeur, non ? Ou peut-être que si. Et Clarke resterait ici pour un long moment.

L'homme parut se méfier. Avait-il entendu des choses sur Clarke ? La façon dont elle avait été libérée de quarantaine... la prise en otage de Maya... cela ne donnait pas une très bonne réputation à la cheffe des délinquants. Et si tout le monde ici la prenait pour une sauvage, au même titre que les natifs ? Non, sinon ils ne lui auraient plus laissé aucune liberté, même si Clarke n'avait absolument pas le sentiment d'être libre, enfermée dans ce bunker. Elle jaugea l'homme alors qu'il lui demandait son nom. Avait-elle dit quelque chose de mal pour qu'il se mette sur ses gardes ? Elle-même était sur ses gardes. Les deux se méfiaient. C'était normal, ils n'étaient pas du même peuple après tout et c'était la première fois qu'ils se rencontraient. C'était normal. Rien à signaler, se rassurait Clarke. Pour l'instant.

- Je suis Clarke Griffin. J'ai parlé à votre président hier. Il n'a pas l'air de vouloir nous laisser sortir.
Elle rangea son papier dans la poche de son jean et chercha quoi faire. Elle ne connaissait pas cet homme et n'avait pas l'air des plus innocentes. Comment prendrait-il ce qu'elle venait de dire ? Clarke espéra soudainement qu'il n'était pas des grands supporters du Président Wallace, car elle venait de montrer son désaccord sur la politique de ce dernier. Elle ne demandait pas grand chose pourtant, juste la libération des siens. En quoi cela était-ce mal ? Elle vivait dehors avec les siens, elle voulait que cela reste ainsi. La place du peuple du ciel n'était pas au sein d'un vieux bunker en pleine montagne. Ils n'avaient pas rejoint la Terre pour se retrouver enfermés à nouveau.
- Et toi, quel est ton nom ? fut la seule chose qu'elle trouva à dire.
Elle ne le connaissait pas encore assez bien pour savoir comment agir en face de lui. Elle espérait simplement ne pas faire de bourde. Il ne fallait pas qu'elle s'attire des problèmes avant qu'elle trouve un moyen de s'échapper d'ici.

Clarke fronça les sourcils. Elle avait bien des références culturelles et historiques, mais elle ne s'attendait clairement pas à être comparée au superhéros extraterrestre. A vrai dire, elle avait toujours vu les ingénieurs et les médecins comme des héros : ses parents en faisaient partie et ils avaient tous les deux contribué à la survie de l'Arche. Eux faisaient des choses significatives. Car si Superman leur avait vraiment été utile, la guerre nucléaire n'aurait jamais eu lieu et ils ne se seraient pas retrouvés dans l'espace en premier lieu. Or, ils avaient besoin de toutes ces personnes qui travaillaient pour le bien-être de l'Arche, la survie de l'espèce humaine. C'est cette leçon-là que Clarke avait retenu de l'Arche. Les rêves étaient beaux, l'idée des super-pouvoirs sublime, mais ils n'étaient pas réels. On devait rester focalisé sur la réalité pour rester en vie.

Clarke ignora cette réplique. Elle n'avait rien à répondre là-dessus. Son prénom lui avait été donné par ses parents sans aucune référence particulière. Au lieu de ça, elle écouta le discours de l'homme, qui avait déclaré se nommer Joseph - encore une fois elle décida de ne pas commenter ceci - et se rendit compte que lui non plus ne soutenait pas les méthodes de son Président. Clarke lui aurait bien demandé son aide, mais Joseph semblait trouver les méthodes de Dante Wallace nécessaires à la survie du peuple montagnard. La curiosité de Clarke était désormais piquée à vif. Avait-elle mal compris quelque chose ? Dans quel camp se trouvait Joseph ?
Le peuple du Mont Weather semblait douter des délinquants. Il les avait sauvés pour les maintenir désormais prisonniers. Mais à quoi cela servait-il ? Ils ne pouvaient pas les garder ici éternellement, les jeunes devaient rentrer, retrouver les leurs !
Joseph proposa de continuer cette conversation dans ses appartements et Clarke accepta. Elle n'avait rien à faire pour le moment et avait une bonne occasion de pêcher des informations.
- Vous ne pouvez pas nous garder prisonniers ici. Si vous voulez savoir qui nous sommes et parvenir à nous faire confiance, il nous fait discuter. Seulement ainsi nous pourrions parvenir à un accord.
Car Dante Wallace n'avait pas dit grand chose à Clarke concernant son séjour ici. Le peuple du ciel et le peuple de la montagne pourraient s'allier, être plus forts face aux natifs, mais les montagnards n'avaient pas l'air de vouloir faire face aux dangers de l'extérieur.